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Biens mal acquis : Blaise Compaoré a échappé à la procédure

 

Ouvert le 2 janvier 2017 au Tribunal correctionnel de Paris, le procès de Teodorín Obiang, fils du président de la Guinée équatoriale, Obiang Nguéma, a été reporté au 19 juin 2017. Il est poursuivi pour enrichissement illégal parce qu’il détient en France un important patrimoine que son revenu ne peut justifier. Ses avocats ont demandé et obtenu ce renvoi pour mieux préparer leur défense. Ce procès est l’aboutissement d’un long processus dans lequel les noms de chefs d’Etat dont certains ne sont plus au pouvoir ont été cités. C’est le cas de l’ex-président burkinabè, Blaise Compaoré.
Voici la chronologie des faits.
L’affaire débute en mars 2007 par une plainte déposée auprès du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris par les associations Survie, Sherpa et la Fédération des Congolais de la diaspora contre 5 chefs d’Etat africains en fonction et leurs familles: Omar Bongo (Gabon), Sassou Nguesso (Congo-Brazzaville), Blaise Compaoré (Burkina Faso), Dos Santos (Angola) et Obiang Nguéma (Guinée équatoriale) pour «recel de détournement de biens publics et complicité».
La plainte a été jugée recevable et en juin 2007, une enquête est ouverte. L’Office central pour la répression de la grande délinquance financière qui l’a conduite relève que 3 sur les 5 chefs d’Etat que sont Sassou Nguesso, Obiang Nguéma et Omar Bongo détiennent chacun un important patrimoine en France (Lire encadré).

Patrimoine
Malgré la quantité des informations, le parquet de Paris classe l’affaire sans suite pour «infraction insuffisamment caractérisée» en novembre 2007.
En juillet 2008, Transparency international France dépose une autre plainte à l’encontre des 5 chefs d’Etat et des membres de leur entourage. Comme en 2007, cette plainte est classée sans suite par le parquet. Le 2 décembre 2008, Transparency-France (TI) et Sherpa déposent une nouvelle plainte assortie d’une «Constitution de partie civile» visant Omar Bongo, Sassou Nguesso et Teodoro Obiang ainsi que leurs entourages pour «recel de détournement de fonds publics».
Comme on le constate, les présidents Blaise Compaoré et Dos Santos n’avaient pas été visés par cette plainte, car l’enquête préliminaire déjà conduite par la police française n’aurait pas permis d’établir de manière incontestable l’existence d’un patrimoine détenu en France que leurs revenus ne pourraient justifier.
Maintenir ces deux chefs d’Etat dans la plainte risquait d’affaiblir sa recevabilité totale, selon TI France. Celle-ci a donc été recentrée sur les trois dossiers pour lesquels plus d’éléments avaient été réunis afin de lui donner le maximum de chances d’aboutir.
A partir de cet instant, on ne retrouvera plus le nom de Blaise Compaoré dans la plainte. Le 5 mai 2009, la doyenne des juges d’instruction au pôle financier de Paris juge la plainte recevable et ordonne l’ouverture d’une enquête judiciaire. Le parquet de Paris fait appel le 29 octobre 2009 et la Cour d’Appel de Paris juge la plainte irrecevable. Ce jugement a plus tard été cassé par la Cour de Cassation le 9 novembre 2010 dans une décision historique, sur un pourvoi de TI-France.
Cette décision marque un tournant décisif pour la suite de la procédure. Pour la première fois, en France, l’action en justice d’une association de lutte contre la corruption, initiée au nom des intérêts qu’elle défend, est jugée recevable. Dans un communiqué en novembre 2010, TI-France indique que la décision constitue une avancée juridique considérable qui va au-delà de l’affaire des biens mal acquis.
En septembre 2011, les 2 juges en charge du dossier ordonnent la saisie de 11 voitures de luxe appartenant au fils du président de Guinée équatoriale, Teodorin Nguema. La procédure va connaitre une évolution suite à une nouvelle plainte des 2 ONG, Sherpa et TI, parce que le parquet refusait d’accorder aux juges un réquisitoire supplétif qui leur était nécessaire pour instruire les faits nouveaux découverts en cours de l’enquête.
En 2012, l’enquête est finalement élargie aux faits postérieurs à la plainte déposée en 2008. Une nouvelle perquisition dans un hôtel particulier appartenant à Teodorin Nguema permet de saisir de nombreux biens mobiliers et des objets de luxe. Un mandat d’arrêt international est lancé contre Teodorin Obiang après le refus de ce dernier de se présenter à la convocation des juges. En mai 2012, il est nommé vice-président de la Guinée équatoriale, avec rang de chef d’Etat, ce qui lui assure l’immunité diplomatique.
Les juges d’instruction du Tribunal de grande instance de Paris décident d’une mise en examen de Teodoro Obiang pour blanchiment, le mercredi 19 mars 2014. Le procès du 2 janvier 2017 est l’aboutissement de cette procédure.

Elie KABORE


Teodoro Obiang: poursuivi en France et aux Etats-Unis

La justice française n’est pas la seule à poursuivre Teodoro Obiang. En juin 2012, le Département de Justice américain a formulé de nouvelles accusations pour des «soupçons de détournement de fonds publics». La justice américaine l’accuse d’avoir dépensé plus de 300 millions de dollars (150 milliards de FCFA environ) «dans l’acquisition de biens et de propriétés».
Pourtant, il ne perçoit qu’un salaire mensuel de 7.000 dollar (3,5 millions de FCFA). Son revenu ne peut donc pas justifier ses acquisitions aux Etats-Unis composées entre autres d’un domaine à Malibu d’une valeur de 30 millions de dollars, un jet privé ainsi que des objets personnels ayant appartenu à Michael Jackson. Il aurait également acheté une propriété de 15 millions de dollars à São Paulo et 6 millions de dollars de vin et de peintures de luxe.

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