Au moment où l’activité de la monnaie électronique continue de s’étendre par la multiplication des opérateurs, le nombre de personnes touchées et les quantités d’argent concernées, la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a tenu à rappeler les conditions et modalités de son exercice. Les activités de la monnaie électronique sont notamment pratiquées par les établissements financiers (les banques), les Systèmes financiers décentralisés (SFD) et les Emetteurs de monnaie électronique (EME). Dans une note qu’elle a publiée le 9 octobre dernier relativement à l’ensemble des systèmes de paiement utilisés dans l’espace UEMOA, la BCEAO a surtout tenu à fournir les détails concernant le cas du paiement électronique.
Même si la note de rappel et d’explications de la banque centrale n’établit pas expressément le lien, on peut toutefois remarquer que cette publication arrive après l’interdiction adressée en mars 2017 à l’opérateur Télécom Orange et sa filiale Orange Money de faire des transferts d’argent entre l’UEMOA et la France.
C’est donc un rappel qui peut avoir l’objectif de clarifier les fondements de cette interdiction.
Selon la BCEAO, la monnaie électronique est une valeur monétaire représentant une créance sur l’établissement émetteur. Elle est stockée sous une forme électronique, y compris magnétique ; et elle est émise sans délai contre la remise de fonds d’un montant supérieur ou égal à la valeur monétaire émise. La monnaie électronique est acceptée comme moyen de paiement par des personnes physiques ou morales autres que l’établissement émetteur.
Quant à l’EME, il est, selon la BCEAO, une personne morale ; autre que les banques, les établissements financiers de paiement et les systèmes financiers décentralisés ; habilitée à émettre de la monnaie électronique. A la différence des banques et des SFD, qui ont d’autres activités en dehors de la monnaie électronique, l’activité de l’EME se limite à l’émission et à la distribution de monnaie électronique. Les EME sont habilités à offrir des services de paiement adossés à la monnaie électronique, exclusivement.
C’est à la faveur des conditions adoptées par les Etats membres de l’UEMOA en 2015 que plusieurs acteurs non bancaires ont obtenu des agréments en qualité d’Etablissement de monnaie électronique (EME).
Avant de pouvoir exercer dans l’activité de la monnaie électronique (émettre et/ou distribuer de la monnaie électronique) dans l’UEMOA ou l’un de ses Etats membres, chaque acteur doit respecter les conditions fixées par la BCEAO. Ces conditions diffèrent selon le profil de l’acteur.
« Toute banque ou établissement financier de paiement peut émettre de la monnaie électronique, sous réserve d’en informer la banque centrale au moins deux mois avant le lancement de ses activités de monnaie électronique », indique-t-elle. Pour ce qui concerne les SFD, ils doivent solliciter une autorisation préalable de la BCEAO. « Tout SFD dont le montant des fonds propres et le montant global des dépôts sont supérieurs ou égaux à trois cent millions de FCFA à la fin de son dernier exercice peut demander l’autorisation d’émission de monnaie électronique à la banque centrale. Cependant, la banque centrale peut, sur la base de l’appréciation du profil de risques, exiger le relèvement des fonds propres dont doit disposer un SFD en vue de les mettre en adéquation avec son volume d’activités », précise la BCEAO.
Pour le cas des autres structures, notamment les EME, l’exercice de l’activité d’émission de monnaie électronique est soumis à l’obtention d’un agrément ou d’une autorisation délivrée par la BCEAO après instruction. La banque centrale ajoute que le capital social minimum pour un EME est de trois cent millions de FCFA. Il doit être intégralement souscrit et totalement libéré en numéraire avant l’octroi de l’agrément par la banque centrale. Toutefois, comme au niveau des SFD, la BCEAO peut, sur la base de l’analyse du profil de risques, exiger le relèvement du capital social d’un EME, en vue de le mettre en adéquation avec son volume d’activités.
A compter l’obtention de son agrément d’exercice dans un État membre de l’Union, l’EME est habilité, sous réserve de requérir l’autorisation de la banque centrale, à exercer ses activités d’émission, de distribution de monnaie électronique et de stockage de données sur supports électroniques pour le compte d’autres personnes morales sur le territoire d’un autre État membre de l’UEMOA. Dans les situations où le distributeur et l’émetteur dans l’activité de la monnaie électronique sont deux acteurs distincts, la réglementation de la BCEAO indique que le distributeur n’est pas contraint de limiter ses activités à un seul établissement émetteur de monnaie électronique. Il peut donc servir de distributeur pour plusieurs émetteurs et commercialiser les produits de ces émetteurs.
Karim GADIAGA
Les sociétés de télécommunications peuvent-elles émettre de la monnaie électronique ?
A priori, les opérateurs télécoms n’en ont pas droit
La réponse de la BCEAO est « non !» « Une société de télécommunications ne peut pas émettre de la monnaie électronique. Toutefois, elle peut créer une filiale exclusivement dédiée à l’émission et à la distribution de monnaie électronique et solliciter auprès de la BCEAO un agrément pour cette dernière. Elle peut également, en partenariat avec un émetteur, distribuer de la monnaie électronique ou jouer un rôle d’opérateur technique », explique la banque centrale.