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Affaire charbon fin : Le procès s’annonce passionnant

Le procès sur l’affaire du charbon fin, prévu en octobre 2019, est très attendu. Les difficultés d’accès à certaines informations sur cette affaire auprès de plusieurs sources ont été levées, après la conférence de presse animée le 6 août 2019 par le Procureur général, Laurent Poda. On peut dire que les langues se sont déliées,après la révélation officielle des poursuites judiciaires par le Parquet général. L’Economiste du Faso a pu consulter quelques documents concernant cette affaire auprès de plusieurs sources et interroger des personnes proches du dossier. Selon nos informations, dès la réception des rapports de l’expert douanier et de l’expert chimiste, Maïza Sérémé, Procureure du Faso près le Tribunal de Grande instance de Ouagadougou,a adressé un courrier au Directeur général des Douanes (DGD) du Burkina Faso. Dans ce courrier daté du 5 juin 2019, elle informait que les rapports des experts, notamment celui de l’expert douanier, contenaient des informations qui devraient intéresser la Douane du Burkina Faso. La Procureure du Faso informait également de la possibilité pour la Direction générale des Douanes d’une éventuelle transaction entre la société Essakane. Si la Douane optait pour cette voie, l’action publique prendrait fin. La lettre de la Procureure du Faso a été réceptionnée le 11 juillet 2019. Dès la réception de cette lettre, la Direction générale des Douanes s’est procuré les copies des rapports auprès de la Procureure pour en prendre connaissance. Après un examen minutieux du rapport de l’expert douanier, la DGD a fait parvenir ses observations à la Procureure du Faso le 25 juillet 2019.
En rappel, l’expert douanier avait relevé 06 infractions. Elles concernent la conduite en Douane, le régime douanier, l’espace tarifaire, la règlementation sur la commercialisation de l’or, les documents exigés pour les exportations et les quantités et valeurs.
La DGD a conclu dans ses observations adressées au Parquet, que seulement 02 infractions sur les 06 constatées retenaient son attention. Il s’agit, d’une part, de la fausse déclaration tarifaire du produit exporté, selon une source très proche du dossier. Elle explique que la loi sur la commercialisation de l’or mentionne que l’or objet de la commercialisation doit être présenté « sous la forme de pièces, lingots ou barres titrés ». Pour les autres substances précieuses, elles doivent être présentées « sous formes standards de commercialisation ». Pour la Douane, la mine de Essakane a présenté des résidus de charbon contenant de l’or, ce qui n’est donc pas conforme à la loi. Mais la DGD estime que l’infraction relative à la commercialisation de l’or ne relève pas de ses compétences.
D’autre part, la non-production des documents exigés pour l’exportation, à savoir l’engagement de change et le titre d’exportation, a été retenue comme une seconde infraction par la DGD, toujours selon notre source. Parmi les documents manquants, figurent effectivement ceux relatifs aux domiciliations bancaires des exportations et au rapatriement des devises. Ces documents n’ont pas été produits par la Mine et constitueraient une infraction.
Au ministère des Mines et des Carrières, il ressort que les rapports des experts ont été obtenus de manière informelle, d’où la prudence dans les avis. Toutefois, ceux reçus par ce canal ont été analysés par le Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB). L’attention du BUMIGEB s’est focalisée sur le rapport de l’expert chimiste. Les observations très techniques du BUMIGEB, dont le Journal a pu se procurer, tendent à réfuter les conclusions de l’expert.
Le BUMIGEB regrette que le rapport ne présente aucun protocole analytique sur le principe scientifique et le matériel utilisé, de même que l’identité du laboratoire qui a effectué les analyses, pour ce qui concerne le cyanure libre et les métaux précieux.
Le protocole d’échantillonnage n’a pas aussi été présenté pour donner plus d’informations sur les 4 échantillons prélevés par sac. En plus, les résultats ne sont pas authentifiés, selon cette société, parce que le rapport ne comporte pas l’identité de la personne qui l’a approuvé et le nom de son laboratoire. Concernant les résultats présentés dans le rapport, le BUMIGEB note que ceux de l’expert tendent vers ceux de Essakane. Pour ce faire, il estime que les sacs dont les teneurs sont sous-estimées devaient être clairement identifiés.
Concernant le taux d’humidité, le paramètre de l’évaporation doit être pris en compte dans l’analyse, lit-on dans le document, puisqu’entre 3 et 5 mois séparent la date de la mise en sac du charbon et la date du prélèvement des échantillons par l’expert.
Un excédent de poids de 84 tonnes contenant 3.322 onces d’or et 1.478 onces d’argent a été révélé par l’expertise. En convertissant les onces en kilogrammes, le BUMIGEB obtient 94 kg d’or d’une valeur de 2,318 milliards FCFA et 42 Kg d’argent dont la valeur est de 11,684 millions FCFA, ce qui donne une valeur totale de 2,330 milliards FCFA.
Les royalties à prélever correspondant à 4% de la valeur de la marchandise, ce qui correspond à 93,2 millions FCFA. S’il y a fraude, c’est donc cette somme que la Mine aurait tenté de frauder comme royalties, selon les estimations de l’expert. Fort de ces arguments, le ministre des Mines et des Carrières a pris l’initiative de rencontrer le Parquet pour proposer une expertise indépendante. Selon nos informations, la Mine a aussi demandé cette expertise indépendante au Parquet afin de reverser les conclusions au dossier. La réaction de IAMGOLDEssakane SA est attendue sur ce point et bien d’autres.

Joël BOUDA


L’expertise indépendante passera-t-elle ?

Il est évident qu’au cours du procès, les Avocats de la Mine reviendront sur la demande de réalisation d’une expertise indépendante. Cette requêterencontrera-t-elle l’assentiment du Parquet qui semble ne pas vouloir en entendre parler avec juste raison ?
Le Parquet a commis ses propres experts, dont un douanier et un chimiste au début de l’affaire. Les résultats de ces experts ont permis au Parquet de confirmer son hypothèse de départ, c’est-à-dire la fraude. Accepter une expertise indépendante, c’est remettre en cause sa propre stratégie et ses propres résultats. Il appartiendra au tribunal de juger de la faisabilité ou de l’intérêt, vu les charges et les conséquences de celles-ci sur les personnes citées. Pour certaines des parties au procès, cela est indispensableo

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