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Conservation des céréales et intoxication alimentaire : «Avec le bio insecticide, on peut éviter ce genre de drame », Dr Roger Nébié, Directeur de recherches en chimie

Dr Roger Nébié, Directeur de recherches en chimie. (DR)

Qu’est-ce que cette technologie «Bio insecticide à base d’huile essentielle et son procédé de fabrication » ?
« Bio insecticide » est un insecticide biologique. Il s’agit d’un produit naturel qui a été mis au point à partir des extraits sans synthèse chimique, sans transformation particulière. Ce produit est véritablement destiné à ceux qui veulent faire de la production naturelle ou de la production biologique.

Qu’est-ce qui distingue cette technologie des autres existantes dans le domaine ?
C’est un produit qui a été mis au point à partir des huiles essentielles des plantes aromatiques comme la citronnelle, la menthe, l’eucalyptus. Nous avons fait l’extraction de ces huiles essentielles en utilisant la vapeur d’eau par le procédé hydro-distillation. Nous avons utilisé ces huiles essentielles avec des supports solides naturels en les mélangeant pour avoir ce bio insecticide naturel.
Contrairement aux produits que nous avons sur le marché, qui sont pour la plupart des synthèses chimiques avec une dose de toxicité plus élevée, le bio insecticide est moins toxique. Mais de plus en plus, d’autres insecticides naturels sont mis sur le marché par des Burkinabè. La particularité de notre bio insecticide réside dans sa capacité pour la conservation des céréales, des légumineuses… le stockage. C’est la seule formule qui existe présentement dans notre environnement.

Sur quelle matière et à quelle fréquence peut-il être utilisé ?
Ce produit peut être utilisé pour la conservation du haricot très attaqué après la récolte sur le territoire national, l’arachide, surtout dans la région de l’Ouest, à cause de l’humidité, protéger le maïs contre le charançon qu’on retrouve dans d’autres céréales. Le principe d’utilisation est de mélanger 120g du bio insecticide avec 25 kg de céréales ou légumineuses qu’on garde bien dans un endroit isolé.
Pour la fréquence, tout dépend des supports. Dans le milieu rural où on a l’habitude des sacs qui ont des pores qui laissent passer l’air, il faut le renouveler très fréquemment, mensuellement même. Si on utilise un contenant où l’air est plus confiné, c’est-à-dire des bidons ou des seaux plastiques fermés, la conservation peut durer des années. Tout dépend du contenant. Nous sommes sur les tests avec différents types de contenants afin de mieux orienter les utilisateurs pour avoir une durée plus longue.

Le Bio insecticide dans un emballage de 120 g

L’utilisation des pesticides pour la conservation des céréales en milieu rural fait souvent des victimes d’intoxication alimentaire. Ce nouveau produit a-t-il des garanties pour éviter de tels drames ?
Tout produit naturel n’est pas forcément exempt de toxicité. Depuis une vingtaine d’années, nous avions demandé à l’Institut des sciences de la santé de faire une étude sur la toxicologie de toutes les huiles essentielles qui ont été utilisées et les résultats ont abouti au fait que ces huiles essentielles sont très peu toxiques, parce que la létalité est tellement faible, c’est-à-dire 3000 mg/kg poids corporel. Ce sont des produits classés peu toxiques par les normes de l’OMS. Vu les petites quantités que nous utilisons pour conserver les kilogrammes de graines, les doses demeurent plus faibles. Je peux dire avec certitude qu’en conservant le niébé, l’arachide, le maïs avec le bio insecticide, on peut éviter ce genre de drame. Cependant, nous mettons l’accent sur la conservation des semences pour le moment. Ces huiles essentielles sont des produits très parfumés qui peuvent modifier le goût des céréales, mais avec les semences, elles sont protégées des champignons, insectes, parasites jusqu’au moins la prochaine saison.
Qui sont les inventeurs de cette technologie ?
C’est une équipe de trois personnes de l’IRSAT, composée d’Ignace Sawadogo, Théodore Nana et du directeur de recherche que je suis. Nous avons été soutenus par Yssouf Ouédraogo de l’INERA et l’équipe d’Antoine Sanou du laboratoire d’entomologie de l’Université Ouaga I. Une fois que nous avons établi l’efficacité des huiles essentielles contre les parasites, il nous a fallu ensuite déterminer la dose pour éliminer les insectes. Enfin, avec l’aide de l’Institut des sciences de la santé, à travers Sylvain Ouédraogo, nous avons su que le produit est très peu toxique sur les mammifères. Comme supports, nous avons essayé l’amidon et l’argile. Nous avons retenu l’amidon de manioc qui a une porosité qui libère petit à petit l’huile essentielle, la rendant moins volatile d’allonger la présence du produit. Le produit a été breveté au niveau de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI).
Nos résultats ont bénéficié du financement du Fonds national de recherche et de l’innovation pour le développement (FONRID) et l’OAPI. Le brevet a d’ailleurs été subventionné à hauteur de 80% par l’OAPI pour encourager la protection intellectuelle.o
Martin SAMA

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