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Huileries : Un secteur en crise

Les huileries du Burkina Faso se portent très mal à cause de la non-maitrise  de l’approvisionnement du marché, principalement du fait des importations incontrôlées à la frontière (quantités, absence de contrôle de qualité et droits de douanes) et à la commercialisation (fiscalité intérieure : TVA 18% et BIC 2%).
Le marché est inondé d’huiles sans précision de nature et de qualité douteuse vendues à des prix très bas en rapport certainement avec la petitesse de leur qualité. Plus de 90% des huiles sur le marché évitent les services de contrôle de qualité.
Ce tableau a été présenté au Premier ministre lors de la rencontre avec le groupement professionnel des industriels. Avec Alexandre Zanna, DG de la SN-CITEC, pionnière du secteur des huileries, L’Economiste du Faso revient sur ce dossier brûlant de l’industrie burkinabè.

L’Economiste du Faso: Quel est l’état de la production nationale d’huiles à ce jour?
Alexandre Zanna, DG de la SN-CITEC: La production nationale d’huiles alimentaires à base de graines de coton est assurée par plusieurs acteurs dont principalement la SN-CITEC, la SOFIB, le GTPOB et le GHB/GIE. Elle est estimée à 30.000 tonnes par an. Les besoins en consommation de la population en huiles alimentaires sont estimés à près de 60.000 tonnes par an (à relativiser en raison de la fiabilité limitée des statistiques).
Plus de 90% des huiles importées rentrent en fraude ou sont vendues dans des conditions frauduleuses à travers la non-application de la fiscalité intérieure (sans facture normalisée, non-collecte de la TVA et du BIC).
En raison des difficultés actuelles du secteur de l’huilerie au Burkina Faso, aucune perspective de développement n’est envisageable, et l’on court un risque d’une grave crise structurelle qui impactera l’économie locale et nationale, avec de multiples conséquences financières, économiques et sociales prévisibles, si rien n’est fait dans les plus brefs délais.
Cette crise ne sera pas sans conséquence sur la campagne cotonnière 2018/2019 prévue pour le mois d’octobre ou novembre prochain.

– Quel est le poids de la SN-CITEC dans la production d’huiles au Burkina ?
La SN-CITEC contribue à la filière coton en apportant à chaque campagne plus de huit milliards de FCFA en prépaiement de la graine de coton aux sociétés cotonnières. Avec une capacité de trituration de 120.000 tonnes de graines de coton par an, la SN-CITEC produit 20.000 tonnes d’huiles alimentaires de marque SAVOR, 48.000 tonnes d’aliments pour bétail et 24.000 tonnes de tourteaux de coton. La valorisation des graines de coton en huiles alimentaires enrichies à la vitamine A de marque SAVOR et en SPAI (Aliments pour bétail et tourteaux de coton) participe fortement à la valeur ajoutée dans l’économie nationale. La SN-CITEC contribue également aux finances publiques par le reversement de centaines de millions de FCFA d’impôts et de taxes, ainsi que socialement par le maintien de milliers d’emplois directs et indirects (Fournisseurs d’emballages, prestataires, etc.).

– On vous reproche votre capacité d’adaptation au marché en termes de prix et de design. Cette critique est-elle fondée?
La critique n’est pas fondée, de notre point de vue. Pour preuve, la SN-CITEC dispose d’importants équipements de la plus récente génération pour toutes les activités de production, de contrôle qualité et de commercialisation.
A titre d’exemple, un important investissement a été réalisé en partenariat avec FASOPLAST au cours de l’année 2017 pour la mise en fonctionnement d’une nouvelle ligne de conditionnement en bidons de 5 litres. Son lancement est intervenu en janvier 2018.
Les projets d’innovations ne manquent pas ; mais pour investir, il faut avoir une perspective de stabilité à moyen terme pour notre entreprise.
Notre design, c’est notre qualité contrôlée par le Laboratoire national de santé publique (LNSP) sur la base d’un protocole de contrôle.

– Le secteur, vous l’avez rappelé au Premier ministre, est en crise. Quelles sont donc ses principales difficultés? Est-ce la fraude ou les facteurs de production qui en sont à l’origine?
A 90%, les fraudes douanières et fiscales ; et à 10 %, les facteurs de productions.
Sur la fraude douanière et fiscale, les importations se font en très grandes quantités à travers des pratiques frauduleuses sur les opérations de dédouanement dans certains postes frontaliers, à travers de fausses déclarations sur les quantités et la valeur transactionnelle fixée à 155 FCFA le litre. En plus, nous ne parlons pas ici de l’absence de vérification de la qualité de ces huiles alimentaires.
A titre d’exemple, le prix de vente du litre d’huiles varie entre 750 FCFA et 825 FCFA au détail. Il est donc impensable de la valoriser à seulement 155 FCFA pour le dédouanement. Cela représente un manque à gagner énorme pour l’Etat ; manque à gagner qui, en plus, ne profite même pas aux consommateurs, mais plutôt aux importateurs et commerçants-distributeurs de ces huiles.
En illustration, notre société importe de l’acide gras de palme pour la production du savon de ménage dont le prix moyen d’achat est de 462 FCFA le litre, en position rendue à la SN-CITEC Bobo-Dioulasso/Burkina Faso.
Or, l’acide gras de palme est un sous-produit de l’huile de palme, contrairement à l’huile de palme qui est le produit noble.
Avec cette précision, continuer d’accepter une valeur transactionnelle de 155 FCFA s’apparente à un refus de recouvrer des recettes pour le financement du PNDES. Sur la fraude fiscale, il convient de relever que les ventes auprès de la quasi-totalité des importateurs et des distributeurs de bidons sont matérialisées par de simples bordereaux de livraison ou des reçus de paiement, nonobstant l’obligation de la facture normalisée en vigueur.
Cette situation crée une concurrence déloyale du fait des prix hors taxes (hors TVA et hors BIC) sur tout le réseau de distribution des huiles importées.
Le prix de vente hors TVA (Taxe sur la valeur ajoutée de 18%), actuellement appliqué par ces concurrents-importateurs, est de 11.000 FCFA le bidon de 20 litres sur les marchés du Burkina Faso.
Depuis le 1er janvier 2018, plus de 50.000 tonnes d’huiles, correspondant à 2.750.000 bidons de 20 litres ou encore 54.945.000 de litres d’huile, ont été importées et commercialisées sur le territoire national.
Sur la base des ventes hors taxes réalisées sur ces quantités, nous estimons le manque à gagner pour le trésor public à 10 milliards de FCFA.
En sus de ce manque à gagner, l’absence de collecte de la TVA et du BIC liée aux méventes des industries locales génère une non-collecte de la TVA d’environ 5 milliards de FCFA.
Globalement, si l’ensemble des textes en vigueur s’appliquait aux huiles importées Huileries
Un secteur en crise, les productions nationales occupe
raient leur place dans l’approvisionnement du marché et dans le développement de l’économie nationale par la valorisation des produits locaux.
Le prix de vente actuel de la marque SAVOR est fixé à 15.000 FCFA TTC le bidon de 20 litres par arrêté N°2017-0179/MCIA/SG/DGCRF du 2 juin 2017, sur la base du prix d’achat de la graine de coton à 80 FCFA HT le kilogramme.

Ce prix est décomposé comme suit :
Prix de vente hors taxes 12.462 FCFA
Taxe sur la valeur ajoutée (18%) : 2.244 FCFA
BIC (2%) : 294 FCFA
Prix toutes taxes comprises : 15.000 FCFA.

Sur les facteurs de production, les contraintes internes de production ne permettent pas de suivre les tendances baissières, notamment les cours mondiaux de l’oléine de palme et les prix de vente des produits importés et vendus sur le marché. Le but du secteur de l’huilerie est de valoriser les graines de coton avec une part de grains pour les paysans.
Avec un prix d’achat de 80 FCFA HT le kilogramme de graines de coton, la part de cette matière première dans le calcul du prix du litre d’huile est de 500 FCFA environ le litre, pour maintenir les revenus des paysans.
Pour nous, la valeur transactionnelle de l’huile ne doit pas être inférieure à 500 FCFA, si l’on veut couvrir à minima la part de la graine de coton dans la composition du prix de revient.

– Le gouvernement a-t-il un plan pour sauver les huileries?
Compte tenu des enjeux socio-économiques et financiers ; normalement, oui !
Les principales difficultés sont connues par le gouvernement, ainsi que les propositions de solutions simples pour permettre aux huileries de maintenir leur place dans la filière coton, la valorisation des produits locaux et leur participation à l’économie nationale.
Il est important de dire que nous ne sollicitons pas d’appuis spécifiques. Notre salut passe tout simplement et nécessairement par la stricte application de tous les textes réglementaires en vigueur, par la taxation réelle et le recouvrement de tous les impôts à l’entrée comme à la commercialisation.
Nous voulons que les lois de marché s’appliquent au sein d’une concurrence loyale sans subvention au bénéfice de la filière coton et huilerie, sans pour autant alourdir les coûts pour les consommateurs.Comme dans tout jeu, il y a des règles à respecter si l’on veut que tout le monde ait sa chance.
Il faut rappeler les risques sanitaires liés à la consommation des huiles disponibles sur les marchés et non soumises aux contrôles de qualité.
Que représente la fraude dans la consommation nationale?
Nous l’estimons à plus de 90% sur les valeurs, les quantités, la nature, les origines et la qualité. Cette estimation reste cependant délicate au vu de la pauvreté et de la non-fiabilité des statistiques dans le domaine.
Nous rappelons que, depuis le 1er janvier 2018, plus de 50.000 tonnes d’huiles ont été importées, vendues ou stockées sur le territoire national, avec comme conséquence un manque à gagner pour le trésor public de plus de 10 milliards de FCFA.

– En termes de mesures, êtes-vous pour le protectionnisme consistant à taxer les huiles importées?
Bien entendu, oui ! Comme c’est le cas dans le monde entier : Etats-Unis, Europe, Afrique (Côte d’Ivoire, Cameroun, Sénégal, etc). Mais ce n’est pas du protectionnisme, les droits de douanes servent à compenser la perte en valeur ajoutée locale du fait des produits importés ; valeur ajoutée indispensable à tout développement économique.
De plus, ce n’est pas un choix de politique nationaliste. C’est une politique économique obligatoire prévue par l’UEMOA et la CEDEAO !

– L’ouverture à la Chine va-t-elle aggraver la concurrence des huiles importées ?
Non ! Encore une fois, pas si les textes sont scrupuleusement appliqués en mettant tous les acteurs au même niveau, dans une saine concurrence, et en interdisant toutes les pratiques illicites.

Entretien réalisé par FW

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